Comment sortir de la crise ?

Effarant !

302000 ! C’est le nombre d’entreprises ayant disparu sur les 5 dernières années (2009 à 2013). Bien qu’il s’agisse ici d’un chiffre brut, intégrant toutes les tailles de structures et toutes les natures d’activités, il est aisément possible d’imaginer les catastrophes humaines et économiques que ce séisme a pu provoquer. Combien de désespérance, de familles explosées, d’usines fermées, de territoires sinistrés.

Les collectivités locales auront encore bien du mal pour leurs plans stratégiques liés à l’implantation d’entreprises.

Des pare-feux ont été proposés qu’il s’agisse du plan « usine du futur » dont l’objectif est d’aider les entreprises à se moderniser, se robotiser. On a aussi beaucoup parlé des 34 plans de la nouvelle France industrielle. Mais tous ces programmes impliquent du temps pour une mise en œuvre longue, laborieuse et coûteuse. Et lorsqu’on parle de robots, de fait les emplois ne suivront pas. C’est le règne de la machine augmentant la productivité de nos entreprises mais sans effet profond sur un niveau de chômage dramatique en France. Les relocalisations sont possibles, mais la réalité des chiffres montre qu’une part infime des emplois détruits sont effectivement recréés. A peine 400 entreprises ont réalisé des simulations complètes sur le logiciel Colbert 2.0 développé par le ministère du redressement productif.

Alors, où sont les solutions ?

 

La première vraie piste intéressante réside dans la régionalisation de nos économies, donc dans le rapprochement géographique des flux d’entreprises. Pourquoi aller chercher si loin compétences et produits qu’il est possible de trouver dans sa sphère de proximité ? Qu’il s’agisse de produits ou de services, la tendance confirmée réside dans le rapprochement des lieux de production et de consommation.

Cet objectif aura sept conséquences particulièrement intéressantes :

  • Une économie évidente des coûts de transport grâce à la proximité client / fournisseur
  • Par voie de conséquence, une possible réduction de prix à la consommation grâce à la réduction des charges liées à l’acheminement des produits
  • Une traçabilité aisée toujours grâce à cette même proximité
  • Une réactivité accrue. Il est en effet évident qu’être plus près c’est être en capacité d’optimiser son service au client
  • Un bilan carbone optimisé
  • Et enfin, une mise en réseau des entreprises qui ne pourra que faciliter les liens entre dirigeants locaux , faciliter l’échange d’informations et densifier une forme de pack collectif si précieux à l’entreprise dans sa conquête des marchés
  • Et plus accessoirement une certaine fierté de se dire « je consomme ce qui est produit chez moi » et « j’évite de cautionner des produits fabriqués par une main d’œuvre exploitée ».

La seule vraie difficulté, est que ce point ne favorise pas fondamentalement l’implantation d’entreprises. Il optimise la mise en réseau à l’endogène mais ne constitue pas fondamentalement un processus permettant la création d’immobilier industriel nouveau.

 

La seconde orientation consiste en une simplification de la vie des entreprises.

Une seule analyse n’est recevable à savoir que l’entreprise, en particulier la TPE, la PME, et l’ETI, doivent avant tout vendre plutôt que d’être noyée sous des obligations administratives extrêmes, souvent très techniques, renouvelées et actualisées en permanence. Sans aborder les aspects juridiques et fiscaux fondamentalement dangereux en cas de mauvaise application.

A titre d’information, une entreprise doit en moyenne répondre chaque année à une fourchette variant de 200 à 300 obligations légales majeures (comptables, juridiques, sociétales, environnementales, relatives à l’hygiène, l’environnement, les statistiques etc.), remplir des dizaines de supports obligatoires (formulaires, demandes de renseignements, déclarations etc.). Selon François Hollande sur France 2, en avril 2013 à propos du choc de simplification : «Aujourd’hui, une entreprise -petite- est obligée d’envoyer 3000 informations par an à l’administration, 3000!».

Autres exemples très concrets :

40000 : il s’agit du volume des pages relatives à la législation du droit fiscal en France.

40 : c’est le nombre de lignes qu’il est possible de trouver assez fréquemment sur certaines feuilles de paie.

On pourrait aussi aborder les dramatiques conséquences liées à l’application calamiteuse des 35 heures ou prochainement l’arrivée de la loi sur la pénibilité.

Ces exemples tellement simples, tellement évidents, résument parfaitement toute la difficulté à favoriser l’implantation d’entreprises, la réalisation de locaux industriels, et plus largement de locaux professionnels.

 

La troisième orientation touche le « fondamental » à savoir l’état d’esprit vis-à-vis de l’entreprise.

Ce point apparaît particulièrement sensible. Il a été exacerbé par, d’un côté, certains grands patrons au comportement scandaleux (salaires dispendieux, retraites chapeau, bonus démesurés) et de l’autre, des postures syndicales toutes aussi inadaptées (blocage d’usines, grèves, préservation d’avantages acquis).

La réponse à ces constats se résume par trois lignes stratégiques simples et applicables à tous :

  • « rester raisonnable »
  • « choisir l’équilibre »
  • « viser l’équité »

Il n’est pas raisonnable d’accepter des rémunérations hallucinantes pour certains et constater que même des classes moyennes n’arrivent plus à aider les enfants dans leur parcours de formation supérieure.

Il est nécessaire en toute situation de viser l’équilibre, ou plus simplement ce que l’on a coutume d’appeler le juste milieu. Eviter les distorsions, les grands-écarts. Dans le cas contraire, on glisse très vite vers l’injustice. Dans de tels cas, les conséquences peuvent s’avérer très néfastes pour l’entreprise. Employeur ou employé.

Et enfin viser l’équité.

Définition selon le Larousse, « Qualité consistant à attribuer à chacun ce qui lui est dû par référence aux principes de la justice naturelle ».

Certainement le critère le plus complexe à appliquer dans l’entreprise, consistant à rémunérer chacun le plus justement selon son degré d’engagement, y compris la notion liée au risque. Mais ceci à la condition absolue de considérer que chacun, dans une société complexe et individualiste, dispose de toute sa place et trouvera de fait dans l’entreprise sa juste place.

Toute la logique pérenne de l’implantation d’entreprise réside à la mise en œuvre de ces trois points. Processus certes complexe, mais tellement indispensable à la croissance.

 

Eric Murgue – avril 2014

Président de STRATE SAS

Fondateur de www.france-implantation.fr