La fin des entreprises constitue le début de l’exclusion

Chacun doit bien comprendre combien l’entreprise, quel que soit son environnement et la nature de ses activités, constitue la sphère idéale d’évolution de l’individu. Ceci tout simplement car elle est multiple, diversifiée, composite, évolutive et géographiquement répartie.

Leur disparition progressive constitue un danger profond car ce sont autant de profils qu’aucune politique publique ne saura compenser en raison d’une diversité absolue de compétences et de parcours de vie que seule l’entreprise permet de valoriser. Entre un jeune sans diplôme issu de quartier difficile, une employée récemment licenciée du secteur textile, un bénéficiaire des allocations chômage sans permis de conduire et un cinquantenaire découragé en fin de droit, les chemins à parcourir son tellement diversifiés, longs et complexes qu’aucune association, mission locale, ou action communale ou régionale ne saura se substituer à l’entreprise elle-même. Et même si des initiatives collectives sont engagées, elles-mêmes adossées à des suivis personnalisés, l’augmentation accrue des fermetures d’entreprises ne fait qu’ajouter à la complexification de l’intégration et progressivement à la spirale de l’exclusion.

Les personnes touchées par ces vagues de licenciements ininterrompus, vont ainsi progressivement et de façon pernicieuse, affaiblir leurs liens sociaux, perdre lentement leur capacité à supporter le tempo imposé d’une activité professionnelle, se laisser gagner par l’engourdissement de l’inactivité et s’isoler jour après jour. Le résultat provoque une double conséquence, à savoir la perte de confiance en soi et l’affaiblissement des réseaux nécessaires à leur propre relance.

L’entreprise est ainsi le premier rempart à la descente vers l’exclusion. Il convient alors de tout mettre en œuvre pour la protéger, la maintenir à flot. L’énergie et les coûts associés pour ce faire seront, quoi qu’il en soit, inférieurs aux processus de remontée sociale et personnelle vers la réintégration des individus qui la composent.

Le meilleur moyen pour permettre à quelqu’un de retrouver un emploi c’est avant tout d’éviter le plus en amont possible qu’il ne le perde. Ainsi, le processus de protection de l’individu ne s’engage plus seulement au moment de son inscription à pôle emploi mais dans la période où sa propre entreprise commence à montrer des signaux de grave fragilité. Faut-il aussi que celle-ci sache l’exprimer, alerter et trouver les points d’appui à sa relance.

L’entreprise constitue par essence l’acteur de la vie le plus qualifié pour aider l’individu à donner un sens à son existence et lui donner les moyens de la mettre en œuvre. La collectivité y gagne alors par l’économie des frais de soutien et d’assistance au demandeur d’emploi, l’entreprise y gagne par l’engagement et la mise en œuvre des compétences de celui qu’elle emploie, et la personne y gagne évidemment par le premier sentiment indispensable à l’Homme, celui d’être utile !

Le développement économique et l’implantation d’entreprise sont ainsi des fonctions-support indispensables pour créer, conforter, soutenir et accompagner les dirigeants qui bien au-delà de la seule fonction de produire biens et services dans une logique de profits, sont devenus dans ces périodes de crise les opérateurs fondamentaux du lien social.